Conscient que le succès de la construction bois se joue aussi à l’échelle régionale, au plus proche des clients, Architecture Bois interroge à chaque numéro les acteurs qui contribuent au dynamisme de la filière. Ce mois-ci, les entreprises C-Tempo, Les Airelles et Alençon Maisons Bois nous livrent leur vision du marché et de ses évolutions.
Francesco DI FAZIO
« C-TEMPO est une jeune entreprise installée depuis 2008, sur le marché de l’Île-de-France. C’est un concept un peu particulier puisque nous ne sommes pas des constructeurs à proprement parler. Nos contrats sont des contrats de maîtrise d’œuvre, concernant exclusivement de la maison d’architecte sur-mesure. Au départ, il peut y avoir une idée bien précise, des plans d’architecte ou une feuille blanche. En fonction du terrain, nous allons vraiment concevoir la maison en fonction des besoins du client, de son budget, puis mener à bien l’intégralité du projet, quelle que soit la taille de l’habitation, la demande du client, hors d’eau-hors d’air, clé en main, avec ou sans aménagement extérieur, depuis la pose du portail jusqu’au jardin paysager. En maîtrise d’œuvre, nous allons choisir l’architecte, le constructeur bois et tous les corps de métier qui travailleront sur le projet. Mais ce sont des choix que nous faisons avec le client. Contrairement à un contrat de CMIste, cette formule laisse toute liberté au client de faire évoluer son projet. En CMI, le client doit répondre à des appels de fonds qui vont bien plus vite que la construction, tandis que là, tout est lié à l’avancement du chantier, avec des entreprises extrêmement triées.
J’ai dans mon équipe un architecte DPLG, il est le garant de la conformité des plans d’exécution, ainsi qu’un conducteur de travaux. La réussite d’un chantier en trois points, c’est savoir communiquer avec tous les intervenants autour du projet, être très présent pour en assurer le suivi et ne pas se tromper dans le choix des entreprises à mettre sur le chantier. Bien que le bâtiment ne soit pas une science exacte, malheureusement, quand on arrive globalement, à maîtriser ces trois points, le chantier se passera bien.
En tant que maître d’œuvre, je m’occupe de toute la partie économique du projet. Je fais établir tous les devis par les entreprises. C’est le client qui a le dernier mot. Il peut aussi proposer des entreprises de sa connaissance. De ce cas-là, je les rencontre, je vais voir leurs chantiers, avant de leur demander un devis. Je n’impose rien, c’est vraiment sur-mesure et à la carte.
C’est une forme de « conciergerie » haut de gamme, dédiée à la construction bois ! À ce jour, je sais répondre à tous les souhaits d’un client. L’entreprise se porte bien. Cette façon de faire correspond forcément à une tendance en train de voir le jour. C’est celle d’une clientèle qui ne veut pas tomber dans les affres de la construction, mais, au contraire, qui souhaite participer selon ses envies, ses disponibilités, son rythme.
L’essentiel de nos chantiers concerne des habitations de 200m². Il y a plus petit, et beaucoup plus grand. Certains clients ont des budgets de 200 000 €, d’autres de plus d’un million. Nous sommes là pour tout le monde. Les chantiers n’excèdent pas 9 mois entre l’exécution des plans et la remise des clés.
En Île-de-France, nous travaillons surtout dans la première couronne. S’il est moins facile de trouver un terrain à bâtir, il est fréquent d’acheter un terrain déjà construit, de tout raser et de repartir de zéro.
Dans les prochaines années, nous allons sûrement encore évoluer,sans pour autant réaliser plus de 15 maisons par an. Par rapport à la RE 2020, nous avons déjà un système d’isolation intérieur-extérieur très performant. Il suffira alors de rajouter quelques panneaux photovoltaïques pour que l’habitat devienne positif. Nous réfléchissons de plus en plus à associer des matériaux, comme c’est le cas dans un prochain projet en R+3 : associer une structure en poteaux-poutres de béton-plancher béton et remplir tous les murs en ossature bois. Ou faire appel à plus de CLT pour les planchers, les porte-à-faux, l’isolation acoustique.
Mais c’est surtout en continuant à développer nos services que nous serons le plus efficaces. En faisant encore plus de « conciergerie ». Travailler avec des courtiers en prêt, s’occuper de la mise en place de tous les réseaux… Aujourd’hui, je propose déjà une décoration d’intérieur, un architecte d’intérieur, des gens qui s’occupent de toutes les démarches administratives. Je pense qu’il faut en élargir ces champs d’action, ne pas se cantonner aux devis et au chantier. L’évolution est dans le détail ».
Richard LEFEBVRE
« Le bilan 2018 est légèrement inférieur à celui de l’année précédente. Il s’explique notamment par le virage que nous avons effectué vers la rénovation. Elle représente une meilleure valeur ajoutée, mais un peu moins de chiffre d’affaires. Cette nouvelle activité est, pourtant, indispensable car elle correspond à un vrai besoin.
Il est vrai aussi qu’actuellement, notre activité dans le neuf est un peu moins facile. Même si la spécificité de l’entreprise, la réalisation de maisons passives, haut de gamme, nous met un peu à l’abri, c’est tout le secteur de la maison neuve qui a souffert en Normandie, l’an passé. Les chiffres du premier semestre 2018 indiquaient une baisse de 23% ! La difficulté de la clientèle potentielle à trouver à la fois des terrains et des financements a logiquement eu des conséquences sur notre activité.
Pour nous, la rénovation se traduit par la réalisation d’extensions, surtout, qui vont de pair avec des chantiers de sur-isolation thermique par l’extérieur. Je me suis positionné par rapport à cette activité il y a déjà quelques années de cela, en effectuant la formation agréée RGE. Mais notre activité dans le neuf était, alors, très dynamique, et je n’ai effectué que peu de chantiers de rénovation.
Cette année, j’ai innové en m’attelant à un chantier de rénovation d’une maison bois. La demande m’a d’autant plus surpris que de l’extérieur, avec son revêtement en enduit, rien n’indiquait que cette habitation des années 80 était en bois. Il a fallu reprendre la façade. Elle montrait des signes d’infiltration d’eau au niveau des menuiseries. L’ossature a fini par en pâtir. Nous avons aussi découvert qu’elle avait un problème de composition de paroi avec des traces manifestes de condensation dans l’isolant. On a donc refait la façade à neuf en conservant une partie des bois existants et on a profité de cette intervention pour refaire complètement l’isolation par l’extérieur. C’est une maison avec des montants de 95mm et 100mm de laine de verre dedans. Il n’y a pas eu de nécessité à établir une étude thermique. Nous avons installé une isolation conforme aux normes actuelles avec un R de 3,7. Comme il ne s’agissait que d’un chantier extérieur, les occupants de la maison n’ont pas été dérangés par les travaux. On a terminé en rendant à la façade son esthétique originale, en enduit.
Si notre activité de rénovation va progressant, il n’est pas impossible que je crée une structure dédiée. Mais il est encore un peu tôt pour l’envisager, d’autant que j’ai investi dans des outils destinés à la construction neuve, avec des amortissements en conséquence. Ce sont des outils qui n’ont pas grand intérêt quand on fait de la rénovation ».
Pascal ROUSSEL
« L’heure du bilan 2018 a sonné. Pour l’entreprise, celui-ci est plutôt flatteur. En effet, nous enregistrons un chiffre d’affaires en hausse de 15%. Cette année est aussi et surtout synonyme d’ouverture de notre nouveau site de fabrication. Il fait 2 000m², soit le double du précédent avec, à l’extérieur, 500m² de lieu de stockage couvert.
Opérationnel depuis septembre dernier, il intègre un robot de taille de charpente, une table d’assemblage et une table de travail. Nous avons fait installer deux ponts roulants, de 20 m par 85m, et tout le matériel qui va avec pour un confort et une qualité de travail optimum. Certes, l’investissement est très lourd, mais il va nous permettre de répondre à une demande en forte augmentation. Les maisons AMB, aujourd’hui, affichent des volumes qui connaissent une belle évolution.
Notre prochain projet, c’est le développement d’une gamme de maisons, les maisons Évidence. La gamme Évidence est conçue pour les primo-accédants. C’est une clientèle qui venait auparavant chez Construction AMB, mais nous ne pouvions répondre à leur demande pour des questions de coûts. Grâce à cette nouvelle gamme, nous allons maintenant pouvoir répondre à toutes les demandes de projets en fonction des budgets.
Les Maisons Évidences sont des maisons pré-dessinées et pré-chiffrées. Les premiers projets démarrent de 80m² à plus de 130m². Ce sont de belles habitations, de qualité. Nos prix varient autour de 1350€/m², cela dépend de l’architecture ou des choix techniques faits par les clients. Nous en avons déjà vendu quelques-unes. Nous allons communiquer et développer leur commercialisation dans les premiers mois de 2019. Nous proposons actuellement plus d’une vingtaine de plans. Nous laissons également la possibilité à nos clients de faire eux-mêmes l’intérieur. Il ne reste alors que l’adaptation au sol à faire : orientation, altimétrie… Nous avons aussi choisi de proposer des maisons ossature bois avec des vêtures extérieures en enduit ou en bardage bois. L’avenir de la maison bois de demain, c’est une préconisation avec des façades qui ne seront pas forcément en bardage pour mieux se fondre dans le milieu urbain.
2019, cela sera aussi le renouvellement de notre label « Maisons de Qualité » grâce auquel, sur les 5 années écoulées, 97% des clients nous recommandent ! Nous avons découvert ce label via notre assureur. Nous n’étions pas dans cette démarche-là, mais nous avons été séduits. C’est un label qui repose sur une série d’audits. On n’achète pas un résultat. Les certificateurs viennent sur nos chantiers, interrogent nos clients. Cette démarche nous a fait évoluer et c’est ce qui nous intéresse.
Les services tel que l’accompagnement du client dans ses différentes démarches, ou encore l’élaboration d’un carnet d’entretien de la maison sont aussi le fruit des échanges avec les intervenants de « Maisons de Qualité ». La réunion technique avec les clients a également évolué. On anticipe, on envoie des documents préparatoires au client pour qu’il prenne le temps de faire ses choix d’implantation électrique, notamment.
Cela nous permet d’être plus dans l’échange. Pour les clients comme pour nous, c’est très positif ! »
Propos recueillis par Mireille Mazurier – Photos de Une : Wikimedia commons
Retrouvez ce dossier et la liste des constructeurs de la région Île-de-France et Normandie dans le numéro 89 d’Architecture Bois.
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