Les annonces du Gouvernement sur la RE2020 ont profondément divisé les professionnels du bâtiment. D’un côté, la filière bois se réjouit et se dit prête à avancer ; de l’autre, la filière béton dénonce « une dérive de la Loi qui favorisera le bois au détriment de l’innovation dans les solutions constructives ».
La guerre est déclarée, entre les différents acteurs de la construction et du bâtiment. Les annonces du gouvernement sur la RE2020, une nouvelle réglementation pour les logements neufs, clairement en faveur du bois, n’en finissent pas de faire réagir.
D’un côté du ring, la filière bois ; de l’autre, la filière béton. Sans surprise, la filière forêt-bois par la voix de son Comité stratégique s’est félicitée, ce jeudi 26 novembre. Elle note « l’engagement affiché par le Gouvernement en faveur de la réduction de l’empreinte climatique du secteur de la construction » et rejoint les ministres sur le fait que « le bois et les matériaux biosourcés ont effectivement un rôle à jouer pour relever ce défi ».
La filière bois se dit prête… à aider les autres !
Les professionnels de la filière bois tiquent toutefois sur la décision de retarder l’entrée en vigueur des seuils d’exigences (en trois phases). « Ils assurent qu’ils prêteront une attention rigoureuse à ce que ces échéances ne desservent pas l’ambition de la RE2020. Ils veulent éviter que ce qui est présenté comme des obligations de résultat se traduise in fine par un statu quo contraire aux ambitions exposées par le Gouvernement et attendues par les Français », commentent-ils.
Alors que le gouvernement exhorte le secteur du Bâtiment à se réformer, la filière forêt-bois rappelle qu’elle est « à la disposition de tous les acteurs de la construction pour faciliter leur transition et contribuer à la mutation du secteur vers le bâtiment de demain ».
La filière forêt-bois se félicite également de la reconnaissance de la méthodologie de l’analyse de cycle de vie dynamique : « une avancée historique ». Et salue « l’instauration de seuils d’exigence carbone qui donnent un signal fort tout en préservant des marges de manœuvre pour atteindre ces objectifs. »
RE2020 et bois : « Une opération de greenwashing »
Un avis loin d’être partagé par certains professionnels qui qualifient cette décision de « surprenante ». Dans un communiqué conjoint, la filière Béton, le FILMM (Syndicat des Fabricants d’Isolants en Laines Minérales Manufacturées), le Syndicat de la construction métallique de France et la Fédération Tuiles et Briques, pointent les « incohérences » du système d’ACV (Analyse du cycle de vie d’un bâtiment qui définit son empreinte carbone, en phase construction, exploitation et démolition) Dynamique retenue par la loi.
Ils lui préfèrent une méthode de calcul « d’ACV classique », utilisée par d’autres pays européens et qui, selon eux, « a fait ses preuves ».
Et d’argumenter par l’exemple : « La nouvelle méthode de calcul fait disparaître pour un bâtiment classique, de l’ordre de 100 kg de CO2 par m2 (sur une empreinte moyenne de l’ordre de 700/750 kg de CO2 par m2) soit plus de 5 millions de tonnes de CO2 par an, sans même modifier le mode de construction… alors que l’empreinte carbone d’un m3 de CLT (bois lamellé croisé) sera diminuée de -350 % en passant de +100 kg de CO2 à -250 kg de CO2 : un artifice qui aurait tous les atours d’une opération de greenwashing », dénoncent-ils conjointement.
Craintes de se voir isoler, décrédibiliser… Les industriels ne mâchent pas leurs mots pour s’opposer à ce qu’ils qualifient d’une « dérive de la Loi, qui favorisera le bois au détriment de l’innovation dans les solutions constructives ».
De fait, si les industriels «partagent l’objectif d’une mise en place à court terme de mesures efficaces pour lutter contre le réchauffement climatique, les professionnels ne peuvent laisser passer des choix politiques qui seraient contreproductifs et mettraient en péril tout un secteur », concluent-ils.
Pour rappel, l’application de la nouvelle réglementation environnementale RE2020 où le bois occupe une large place, doit permettre à la France de répondre aux objectifs qu’elle s’est fixée dans le cadre de sa Stratégie nationale Bas Carbone. Elle s’est notamment engagée à diminuer les émissions des secteurs industriels, dont le Bâtiment, d’au moins 30 % en 2030 pour espérer atteindre la neutralité carbone en 2050.