La région Provence-Alpes-Côte d’Azur est la 2ème région française la plus boisée, avec 51% de son territoire. Le cœur de filière emploie 8 280 salariés, dont 37 % travaillent dans la construction-menuiserie en bois, premier employeur. Olivier Gaujard, président de l’interprofession Fibois Sud Paca, nous explique les enjeux de la restructuration de la filière en région Paca.
« Fibois Sud Paca est la plus jeune des interprofessions bois. Elle regroupe les anciennes structures, Fibois 04-05 et Fibois 06-83, et toutes les organisations professionnelles régionales de la filière forêt-bois. J’en assume la présidence depuis bientôt deux ans. On part de très loin. La région n’a presque plus de scieries, une vingtaine de petites structures, à peine.
La région Paca est un territoire vaste, riche de contrastes : il n’y a pas grand-chose de commun entre la forêt alpine de Mélèzes, de Pins sylvestres, d’Épicéas et de Sapins et la forêt varoise avec le Pin d’Alep et le Chêne-liège.
Utiliser le Pin d’Alep en structure
Nous avons réalisé une grosse action de communication, l’an dernier, pour relancer la valorisation du Pin d’Alep. Elle conclut un travail de longue haleine, pour faire caractériser cette essence de manière à l’utiliser en structure. Ce bois a de très bonnes capacités. Il est désormais classifié à l’identique des autres Pins : sylvestres, noirs…
Nous travaillons aussi à réveiller la filière du Chêne-liège, moribonde. Il existe d’importantes suberaies, notamment dans le Var. Chaque année, on exploite, en France, 300 tonnes de liège alors que le potentiel, facilement accessible, est plutôt de 3000 tonnes. En se donnant un peu de mal pour restaurer les suberaies, ce serait même 6000 tonnes par an.
« Le bouchon n’est pas le seul débouché du liège, puisque l’on s’en sert comme isolant dans le bâtiment.»
Olivier Gaujard
Utiliser plus massivement le Chêne-liège
Le bouchon n’est pas le seul débouché du liège, puisque l’on s’en sert comme isolant dans le bâtiment. Il est encore très cher mais ses qualités sont incontestables : incompressible, imputrescible… Il est particulièrement approprié pour isoler les parties enterrées des bâtiments. On peut aussi, comme cela se fait au Portugal, s’en servir en isolation par l’extérieur, sans rajouter d’enduit dessus.
On réalise ainsi de très beaux bâtiments. Deux maisons ont été isolées de la sorte en Paca. Le liège prend une jolie teinte argentée au fil du temps ; c’est très harmonieux. Il se pose en deux couches croisées de 80 à 100 mm d’épaisseur. Mais son classement en réaction au feu (E) limite son utilisation aux maisons individuelles dont les façades se trouvent à au moins 4 m des limites du terrain. Nous projetons d’effectuer des tests au CSTB pour essayer d’améliorer sa place dans ce classement.
Le lamellé-collé combiné pour relancer les scieries de la région
Je suis également secrétaire de l’Association Bois des Alpes. Nous cherchons à valoriser toute la ressource forestière du massif alpin : sapin, épicéa, mélèze, cèdre et tous les pins. Nos travaux concernent les bâtiments multi-étages bois, l’ossature bois et le lamellé-collé combiné.
En Norvège, le plus haut immeuble en bois du monde, R+18, en poteaux-poutres et panneaux de façades en ossature bois, doit sa stabilité à un système d’exosquelette périphérique. Pour fabriquer ces diagonales de 125cm par 62cm, les professionnels norvégiens se sont servis de bois lamellé-collé combiné (combinaison de lamelles C24 et C30). Ce produit, méconnu en France, est obtenu à partir d’Épicéas quelconques : pas très hauts, ni très gros, plein de branches et de nœuds. Le bois le plus qualitatif est réservé aux lamelles extérieures tandis qu’un bois moins bon suffit pour la partie centrale.
En Paca, à côté de la charpente traditionnelle, le lamellé-collé combiné pourrait être une des solutions pour relancer les scieries d’où ne sortirait qu’un tout petit nombre de sections, destinées aux bois d’ossature ou aux lames de lamellé-collé. Utiliser le Bois des Alpes de cette façon permettrait de maîtriser la qualité du produit et son prix. L’enjeu est de prouver à tous les maîtres d’ouvrage que nous avons la capacité à construire des immeubles bois multi-étages avec le bois de notre région. »
Propos recueillis par Mireille Mazurier – Photos : © DR
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