Pénurie de matériaux, adaptation à la crise sanitaire, prise en compte du changement climatique… Les professionnels de la construction bois sont en première ligne pour relever les grands défis de ce siècle. Chaque mois, ils nous donnent leur vision de l’évolution du marché et de leur entreprise. Le point avec Christophe Montourcy, gérant de CM Bois & Habitat.
« Le port du masque dans les véhicules, les distanciations sur les chantiers font désormais partie de notre quotidien. Et la réouverture de certains restaurants pour les salariés du bâtiment est une bonne chose. Aujourd’hui, nous sommes rôdés.
C’est d’autant mieux que le travail ne manque pas. Depuis 2019, nous répondons à une forte demande. Elle nous a permis de passer 2020 sans problème, malgré le premier confinement. Même si, comme tout le monde, avec la crise sanitaire, nous avons pris du retard sur notre planning initial.
Désormais, nous devons faire face à un problème plus important, celui des approvisionnements en matériaux. Je peux témoigner qu’aucun secteur du bâtiment n’est épargné par la pénurie de matériaux. Pour les menuiseries, qu’il s’agisse de Hörmann, Bubendorff ou de nos fournisseurs locaux, nous sommes passés de 4 à 10 semaines de délais.
Une pénurie de matériaux qui touche le bois
En approvisionnement de bois, tout comme l’OSB, on est passé du simple à plus du double. Cela concerne aussi le bois local, pour lequel les délais sont devenus très importants. Cela nous pénalise même si nous importons aussi du bois certifié de Belgique et d’Allemagne. Nos fournisseurs ont du mal à faire face à cette forte demande, accentuée par les besoins du marché américain.
Parmi les bois locaux, le Douglas nous fait défaut, alors qu’il s’agit d’une essence que l’on trouve en grande quantité, dans notre région forestière. Tout augmente : la demande, le prix, mais pas l’approvisionnement. À mon sens, ça ne met pas actuellement en valeur la filière bois. La RE 2020 s’apprête à valoriser le matériau bois pour le rendre encore plus présent dans la construction. Mais si, aujourd’hui, alors que la construction bois ne représente qu’une petite part du marché du BTP, les professionnels bois n’arrivent pas à être approvisionnés, qu’en sera-t-il demain quand nous devrons répondre à des marchés beaucoup plus importants ? La Fédération du Bâtiment a d’ailleurs alerté l’État sur ce problème d’approvisionnement. En ce qui nous concerne, pour l’instant, la demande est là. Notre carnet de commandes est plein pour au moins six mois.
« C’est le moment de passer à l’acte »
Nous répondons encore à des appels d’offre, même s’ils sont moins nombreux. Certains projets, bloqués pour cause de crise sanitaire, réapparaissent aujourd’hui. Il s’agit de nombreux cabinets d’architectes désireux de mettre le bois en valeur. Ce qui est une très bonne chose, malgré les problèmes d’approvisionnement actuels. Dans cette optique de mise en valeur du matériau bois dans la construction, nous avions déjà des projets d’agrandissement en 2019-2020. Ce sont des projets pour lesquels nous investissons, en 2021, 1,5 million d’euros en bâtiment et en machines, pour développer notre production de préfabrication.
C’est le moment de passer à l’acte. Il faut anticiper, se mettre à jour pour pouvoir rebondir dès que le marché progressera correctement. Dans l’état actuel des choses, cela signifie prendre des risques. Mais j’ai appris à faire avec. J’y crois et je continue à y croire.
Je ne suis pas inquiet pour 2021. Cette entreprise est un projet d’avenir. Avec un pied à terre à Rodez, au cœur de l’Aveyron, grâce au rachat des Ets Singlard en 2020, en plus de notre siège social au Fel, près d’Aurillac, nous gagnons en visibilité dans la région. CM Bois & Habitat, aujourd’hui, c’est un effectif de 24 personnes plus que jamais au service de la construction en structure bois».
Propos recueillis par Mireille Mazurier – Source : Architecture Bois N°103
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