Vous souhaitez construire une maison bois en Nouvelle-Aquitaine en 2022 ? Découvrez l’envers du décor avant de vous lancer ! À travers nos interviews, rencontrez les acteurs qui font la construction bois en Nouvelle-Aquitaine, afin de mieux cerner le contexte régional et économique actuel.
« Au sein de l’interprofession FIBOIS Nouvelle-Aquitaine, nous sommes de plus en plus sollicités par rapport à la construction bois ». Hugues Petit-Étienne est l’un des prescripteurs Bois-Construction de l’interprofession. Il est basé à Tulle, dans le Limousin, depuis 10 ans et vient de boucler le rapport d’activité de l’association.
Entre 2020 et 2021, les échanges effectués avec des professionnels sur l’intégration du bois dans une construction ont triplé, passant de 73 à 210. « Le nombre de télé conseils émanant de maîtres d’ouvrage, d’architectes, a également beaucoup augmenté ; des demandes très diverses, mais toujours en lien avec un projet de bâtiment très concret ». Au fil des années, l’interprofession a vu le nombre de ses adhérents croître régulièrement, affichant désormais plus de 370 adhérents, tous métiers de la filière confondus.
Nouvelle-Aquitaine : la plus grande région boisée de France
La Nouvelle-Aquitaine, c’est un territoire de près de 3 millions d’hectares de forêt – soit 1/3 du territoire régional -, la plus grande région boisée de France hexagonale ; et la première, en termes de récolte de bois.
Dans cette région jeune, née, sur le plan administratif, en 2016, de la réunion de 3 territoires aux identités fortes, Aquitaine, Limousin et Poitou-Charentes , la diversité des essences contribue à la dynamique de la filière forêt-bois-papier : hêtraies des Pyrénées, Douglas, Sapins et Epicéas du Massif Central, Pin Maritime des Landes de Gascogne, chênaies de Dordogne et du Poitou, peupleraies de Lot et Garonne.
Ici, le bois fait vivre 28 000 entreprises, 59 000 salariés. La filière est le 3ème employeur du secteur industriel régional.
L’usine de production de Pin maritime de Sogy Bois dans les Landes – © groupe Abso Bois
Le prix régional de la construction bois : un indicateur de tendance
« Le Grand Prix de la Construction Bois (qui récompense les projets de maison bois et logement en Nouvelle-Aquitaine et dans les autres régions, ndlr.) est un très bon indicateur de l’évolution de l’utilisation du bois dans le bâtiment. Pas tant pour le nombre de participants, une bonne centaine par an, mais pour l’évolution de la construction bois.
Dans les dossiers de candidature consacrés au logement, les chantiers de réhabilitation faisant appel au bois sont passés de 6% en 2020, à 14% en 2021. Il est aussi intéressant de constater que, depuis la création du Grand prix, les produits biosourcés, dans le domaine de l’isolation notamment, ont fait une belle percée. Fibre de bois, ouate de cellulose, paille et, dans une moindre mesure, chanvre ont fait leur apparition dans la conception de bâtiments publics. En dépit des contraintes liées aux avis techniques, de plus en plus d’équipes de maîtrise d’œuvre travaillent avec des contrôleurs techniques pour placer des isolants biosourcés dans les bâtiments. Ce sont des choix que l’on retrouve aussi dans l’habitat, même si la marge de progression est moins importante ».
Premier prix régional de la construction bois catégorie Habiter une maison bois © Charlotte Wibaux Eco Architecte
Logements bois en Nouvelle-Aquitaine : les essences locales de plus en plus recherchées
Autre constat établi par le prescripteur, les essences locales, régionales sont de plus en plus recherchées ; elles sont mentionnées dans les appels d’offres pour des usages de structure, bardage, ou encore aménagement. « Avec la mise en place de la réglementation environnementale RE 2020, on peut penser que les planètes s’alignent autour de la construction bois. D’autant qu’un gros travail de recherche a été effectué par des organismes reconnus, la FCBA, le CSTB, des fournisseurs de matériaux également, par rapport aux performances du bois », précise Jean-Sébastien Pommepuy, chef de projet en bureau d’études structures à Bordeaux et ancien compagnon charpentier.
« Amélioration des DTU, évolution des normes aux feu, essais acoustiques, le travail de la filière bois a contribué à l’évolution de nouveaux bâtiments. Il y a 20 ans, nous n’avions pas de construction en CLT, aucune classification des bois mis à part pour le lamellé-collé. Lorsque l’on construisait un immeuble R+2 en ossature bois, on parlait d’un chantier important ». Aujourd’hui, les projets bordelais sont en R+8 et R+9 ; ils associent le bois au verre et au béton. « Le CLT, le poteau-poutre, les murs en ossature bois créent des assemblages de haute technicité qui ne supportent pas l’à peu près ». Et du savoir-faire : « Pas plus qu’un charpentier n’est en mesure de maîtriser le coulage d’un béton, la mise en place de prédalles ou de murs préfabriqués, un maçon ne peut comprendre les problématiques des assemblages bois ».
© Jean-Paul Viguier Architecte/Eiffage/EPA Bordeaux Euratlantique
Un dialogue nécessaire auprès du grand public
Pour autant, la construction bois comme argument environnemental, élément de poids dans la diminution des gaz à effet de serre, nécessite de mettre à bas bien des idées reçues. « Ici, en Nouvelle Aquitaine, plus encore dans le Limousin, nous avons découvert que cette mise en avant du bois, des arbres et de la forêt nécessitait d’être expliquée auprès du grand public. Nous avons assisté à la montée en puissance d’un discours très dur sur la compréhension de l’entretien des forêts, la coupe des arbres ».
L’interprofession a mis en place des opérations de médiation, pour ne pas perdre le dialogue avec une population qui côtoie la forêt au quotidien. Une démarche d’autant plus importante que la nécessité de travailler avec des bois de construction issus de forêts locales ou régionales, a pris tout son sens depuis les récents problèmes d’approvisionnement en bois d’importation.
Maison bois en Nouvelle-Aquitaine : des prix instables et des retards
« Nous faisons partie des entreprises avec un peu de trésorerie. C’est ce qui nous a permis de stocker quelques produits bois, du bardage, des lames de terrasses. Réserver le bois a permis de sécuriser notre activité de constructeur », confie Yasmine Serre, gérante de l’entreprise spécialiste de la maison bois madriers en Nouvelle-Aquitaine, Alaya Maisons Bois. « La période a été délicate ; j’ai même changé mon monde de fonctionnement vis à vis des fournisseurs pour ne plus me retrouver à accepter des tarifs prohibitifs, voire des délais sans lendemains ».
Prudente, la gérante a également revu ses contrats. « Il m’est difficile, à ce jour, de garantir les prix annoncés dans les devis que, pourtant, je réalise. En tant que constructeur, si je peux garantir le prix du bois, je n’ai absolument pas la main sur le reste : le coût des isolants, du placo, de certaines pièces de menuiserie… » La commande des matériaux n’a lieu qu’après l’accord du permis de construire, délais de recours inclus. « Mes clients sont informés que les prix du marché ne sont pas stables ; Nous en sommes déjà à 20% de plus d’augmentation par rapport aux coûts de 2020. Les prix du bois se sont stabilisés, mais il y a encore beaucoup d’interrogations ».
Yasmine Serre © DR
Prévoir des délais supplémentaires, pouvoir proposer un plan B lorsque le chantier est mis à mal par des retards ou par des problèmes d’approvisionnement, savoir s’adapter pour durer, Yasmine Serre a décidé de gardé les pieds bien sur terre. « Je considère qu’il ne s’agit que d’un mauvais moment à passer. On m’a toujours dit que le vent soufflait moins fort dans les petites voiles que dans les grandes : je suis une petite voile ».
Maison bois en Nouvelle-Aquitaine : les surfaces habitables ont fondu de 20% en moyenne
Pour la clientèle aussi, ces perturbations ont nécessité de s’adapter. Les surfaces habitables pour une maison bois ont fondu de 20% en moyenne en Nouvelle-Aquitaine. Les projets actuels oscillent plus souvent entre 80m² et 100m², pour rester dans le budget. Pour autant, du Béarn au Bassin d’Arcachon, les projets confiés à l’entreprise se succèdent. Le carnet de commandes est plein pour plusieurs mois et la demande de nouveaux projets est très rassurante.
« Je suis convaincu que l’avenir de la construction bois va se partager entre des habitats-cocons, très qualitatifs mais avec de plus petites surfaces et de plus grandes maisons anciennes à rénover, dans lesquelles le bois en surélévation ou en extension à tout son rôle à jouer », avance Hugues Petit-Etienne. « Tout ceci est extrêmement important. Il faut que la filière bois ait des soutiens forts, à commencer par l’État et jusqu’aux collectivités, pour que l’on puisse, nous tous, entreprises du BTP, bureaux d’études, évoluer, prescrire à juste titre, et composer avec ces techniques qui reposent sur le bois et les matériaux biosourcés», conclut Jean-Sébastien Pommepuy.
Cocon de luxe en bois pour une extension en pleine nature © Sybille de Margerie
Texte : Mireille Mazurier – Photo de Une : Alaya Maisons Bois © Cyril Richard
Retrouvez ce dossier et la liste des constructeurs de la région Pays de la Loire et Bretagne dans le numéro 109 d’Architecture Bois.
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