Paroles de Pros : Construction bois en Occitanie

Conscient que le succès de la construction bois se joue aussi à l’échelle régionale, au plus proche des clients, Architecture Bois interroge à chaque numéro les acteurs qui contribuent au dynamisme de la filière bois. Ce mois-ci, les entreprises CM Bois & Habitat, Escaffre Bois, Cogébois et Bois & Envie nous livrent leur vision du marché et de ses évolutions…

Construire en bois en Occitanie


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Christophe Montourcy, gérant de l’entreprise de construction de maisons bois CM Bois & Habitat

Nous allons avoir un automne très chargé jusqu’à fin février. Tout le travail commencé il y a un an, se concrétise aujourd’hui au niveau fabrication. Nous avions pris du retard avec les entreprises de maçonnerie en raison du mauvais temps au printemps. Les ponts du mois de mai qui ont suivi, nous ont pénalisés.
Mais le vrai souci, c’est le manque de personnel. Malgré une rentrée très dynamique, je ne trouve pas d’ouvriers qualifiés. Depuis deux ans, les maçons, les couvreurs se font de plus en plus rares. C’est devenu un gros problème pour toutes les entreprises. Désormais, je forme en interne. Auparavant, nous avions le choix parmi des dizaines de candidatures. Aujourd’hui, c’est à moi, en tant que chef d’entreprise, de démarcher pour attirer du monde.

Nous sommes en zone rurale, mais à Brive, Aurillac, Montpellier, le problème est le même. Pourtant, les jeunes sont de retour dans les centres de formation. Mais la source a commencé à se tarir il y a 20 ans et aujourd’hui, nous le payons. D’autant que nous ne sommes pas sur des territoires suffisamment attractifs. Actuellement, je forme des étudiants en BTS en alternance. Dans les faits, je compose les équipes de pose en fonction de leurs semaines de présence.

Depuis deux ans, les maçons, les couvreurs se font de plus en plus rares. C’est devenu un gros problème pour toutes les entreprises.

Christophe Montourcy, gérant de CM Bois & Habitat

Pour autant, je ne suis pas en retard dans mes chantiers. Mais si certains clients sont patients, je le suis nettement moins… 2020 se présente correctement. Les demandes sont là. La tendance est plutôt positive. Nous restons confiants, même si depuis trois-quatre ans, les chiffres de la construction bois sont stables, sans augmentation flagrante.
Mais, comparée à la construction traditionnelle, la construction bois n’a pas régressé. Je vois passer de plus en plus d’appels d’offres de projets collectifs mentionnant la mixité des matériaux. Je suis partisan de ces alliances. Sur certains ouvrages conséquents, cela apporte plus de stabilité. C’est un travail intelligent. Il faut savoir marier les matériaux. La construction ne s’en portera que mieux.

Quant à savoir si cela figurera dans la RE 2020 …Mais je m’aperçois que l’on nous interroge davantage sur l’origine de nos bois. C’est déjà l’effet « bilan carbone » que devrait imposer la nouvelle réglementation, avec de plus en plus d’intérêt pour les circuits courts. Pour ce qui nous concerne, nous travaillons uniquement avec des bois certifiés et ça se sait. D’ailleurs, nous participons à la démarche de labellisation de l’utilisation des bois locaux, comme le Douglas et l’Épicéa que l’on trouve beaucoup en Occitanie et Auvergne-Rhône-Alpes.

Christophe Montourcy, Gérant CM Bois & Habitat


Escaffre Bois Production

Les marchés des immeubles de grande hauteur échappent totalement à des entreprises comme les nôtres. Escaffre Bois s’adresse au marché du pavillon bois avec une activité liée uniquement à du spécifique. Nous fabriquons de la fermette, de la charpente traditionnelle qui est notre cœur de métier et du mur ossature bois. Nous réalisons des pavillons haut voire très haut de gamme pour des entreprises qui viennent avec leurs architectes. Dans notre bureau d’études, quatre projeteurs DAO sont à même de répondre à des spécificités architecturales.

Nous suivons de près l’évolution de la maison bois pour laquelle nous avons conçu une gamme de murs destinés à être enduits. Nous assistons à une croissance des commandes en ce sens. Selon nous, le marché du bardage est de plus en plus concurrencé par celui de l’enduit de façade. Ainsi, nos murs ont une sur-isolation en fibre de bois prévue pour recevoir un enduit identique au système ITE.

Nous croyons que l’avenir de nos métiers sera dans la recherche de la quintessence de la qualité des différents matériaux qui composeront un produit.

Jean-Michel Escaffre, gérant d’Escaffre Bois

Dans l’optique de la RE 2020, nous avons développé un mur bois-béton dont le brevet a été déposé en 2018. Une procédure d’avis technique est en préparation avec le CSTB. Avec ces procédés de murs, nous recherchons la haute performance thermique qui intègre l’isolation pour l’hiver et la réduction des coûts de chauffage, mais aussi la protection contre la chaleur l’été avec un fort déphasage et une très grande amplitude thermique. À cela s’ajoute une très bonne performance acoustique, la haute performance d’étanchéité à l’air, ainsi qu’une bonne stabilité au feu. Ces nouveaux produits sont à mettre en corrélation avec la future règlementation.

Nous pensons que le mono matériau a ses limites. Nous croyons que l’avenir de nos métiers sera dans la recherche de la quintessence de la qualité des différents matériaux qui composeront un produit. Les nouvelles normes feront qu’il faudra construire encore mieux, plus performant. Pour répondre à des projets spécifiques, il n’y a que l’industrialisation en atelier, alors que le travail sur chantier est devenu trop aléatoire avec de la main d’œuvre low cost (risque de malfaçons…).
Nous avons d’autres projets, tel qu’un mur autoporteur pour de la surélévation de maison (brevet déposé). Ces innovations nous ont amenés à inventer une pièce de fixation des murs au sol. Elle est en cours de finalisation avec un industriel partenaire. Ce sont nos prochains développements. Les brevets que nous avons déposés vont dans ce sens.
Jean-Michel Escaffre, Gérant Escaffre Bois


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Thierry Brethes, gérant de l’entreprise de construction de maisons bois Cogébois

Thierry Brethes, Gérant Cogébois

Nous terminons l’année conformément à nos objectifs. Mais nous avons été surpris par le comportement des clients potentiels : le nombre de demandes d’informations s’est poursuivi tout au long de l’année, sans jamais se tarir, juillet-août y compris. Jusqu’alors, nous avions l’habitude d’une période estivale plutôt calme.

Cela dit, depuis quelques années, le nombre de projets réalisés s’est stabilisé. Notre chiffre d’affaires se répartit entre 30% de contrats en auto-construction, 60% en hors d’eau-hors d’air et les 10% restants correspondent à du clé en main. L’entreprise est basée dans le Gers et ne travaille qu’avec des artisans et des produits locaux. Nos fournisseurs les plus éloignés sont les scieries du Centre de la France. C’est de là que proviennent tous nos bois.

Comme tout le monde, nous essayons de savoir quel sera le contenu de la RE 2020, mais, en ce qui concerne le bilan carbone, nous ne devrions pas être mal classé. Depuis 1992, le système constructif de nos maisons n’a pas changé, contrairement au complexe d’isolation. Nous avons choisi d’ajouter un doublage intérieur.

Beaucoup d’auto-constructeurs s’arrêtent en chemin, par manque de financement

Thierry Brethes, gérant de Cogébois

Le même concept est appliqué aux kits pour auto-constructeurs. Ces derniers sont de plus en plus nombreux à venir nous consulter. Mais beaucoup s’arrêtent en chemin, par manque de financement. L’obtention du prêt reste problématique pour un auto-constructeur. Pourtant, à ce jour, plus de 500 kits d’auto-construction sont sortis de nos ateliers et nous n’avons connu aucun problème. Il est vrai, aussi, que les projets que l’on nous apporte, concernent surtout de belles et grandes maisons. Les primo-accédants ne sont pas nombreux à venir nous trouver.

En 2020, nous ne devrions pas modifier notre mode de fonctionnement. Cette année, nous étions un peu juste en personnel, mais nous avons appris à être prudents et à nous organiser en interne. Nous avons connu suffisamment de crises économiques

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Michel Blattes, gérant de l’entreprise de construction de maisons bois Bois & Envie

Michel Blattes, Gérant Bois & Envie

Actuellement, nous travaillons sur les appels d’offres remportés par notre maison mère, la SAS Pistre & Fils, pour un grand lycée en ossature bois à Gignac, près de Montpellier ainsi que celui d’un centre scolaire à côté d’Aix-en-Provence. Ce sont des projets qui nous portent, car 2019 n’a pas été aussi réussie que nous l’envisagions sur le marché du particulier.

Un certain nombre de contrats a été reporté sur 2020, en raison de dossiers de prêts qui ont tardé à être finalisés. Ainsi, ce n’est qu’en septembre dernier que nous avons lancé le chantier d’une habitation qui avait été initialement prévu en avril. La demande de prêt s’était perdue dans les méandres de l’organisme bancaire.

Depuis 12 ans que je pratique l’univers de la construction bois, j’ai vu les candidats à l’acquisition d’un logement bois se transformer. Ce sont désormais de véritables connaisseurs du matériau et de la construction, convaincus et très bien informés. Ce qui, en revanche, n’a pas l’air d’être le cas des conseillers de banques.

Les candidats à l’acquisition d’un logement bois sont désormais de véritables connaisseurs du matériau et de la construction, convaincus et très bien informés.

Michel Blattes, gérant de Bois & Envie

Nous sommes une entreprise régionale, ne travaillant qu’avec des bois locaux, le Douglas et l’Épicéa achetés à des scieurs labellisés « Bois du Massif Central ». Mais, dans le cadre d’appels d’offres, cela ne suffit pas : on nous demande de plus en plus souvent d’apporter une certification supplémentaire justifiant que ce qui sort de nos ateliers est bien obtenu à partir d’essences locales. Alors qu’il me suffirait de présenter la labellisation de mes fournisseurs. Une certification devrait suffire amplement. De toute façon, nous n’avons jamais dérogé à notre politique interne qui est de travailler en local, avec la filière la plus courte et le bilan carbone le plus faible possible, en utilisant des essences adaptées au milieu, comme nos Douglas et nos Épicéas ».

Propos recueillis par Mireille Mazurier

Source : ABD 95 (décembre 2019/janvier 2020)

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