Le gouvernement a pris plusieurs mesures d’urgence liées à la crise sanitaire du coronavirus. Parmi elles, la suspension des délais d’instruction pour les demandes de permis de construire pour tous les bâtiments. Votre projet de maisons bois pourrait bien être repoussé de quelques mois… Le point sur la situation.
C’est l’ordonnance n°2020-306, en date du 25 mars, qui a mis le feu aux poudres. Par cette loi, le gouvernement vient d’adapter, de manière provisoire, les procédures de délivrance, d’exécution et de contrôle des autorisations d’urbanisme.
« L’ordonnance comporte des mesures suspendant les délais applicables aux demandes présentées aux autorités administratives. Sont concernées les demandes donnant lieu à une décision d’une autorité administrative, et notamment des décisions implicites d’acceptation ou de rejet ainsi que les délais fixés pour les acteurs pris dans le cadre de la procédure d’instruction de ces demandes », explique le ministère de la Cohésion des Territoires.
Plus précisément, les demandes formulées en matière de droit des sols (déclaration de travaux, permis de construire, permis d’aménager, etc…) sont concernées.
Les délais applicables aux déclarations présentées aux autorités administratives (par exemple une déclaration d’intention d’aliéner, DIA), sont également suspendus.
Maison bois : quels délais d’instruction habituellement ?
En temps normal, l’administration dispose d’un délai légal pour demander des pièces complémentaires, le recueil des avis préalables pour certains permis ou de prise en compte des recours des tiers contre les permis délivrés et affichés.
« Selon l’article R. 423-23 du code de l’urbanisme, les délais d’instruction de droit commun des demandes d’autorisation d’urbanisme sont d’un mois pour les déclarations préalables, de deux mois pour les demandes de permis de démolir et pour les demandes de permis de construire portant sur une maison individuelle, et de trois mois pour les autres demandes de permis de construire et les demandes de permis d’aménager (sous réserve des modifications ou prolongations prévues aux articles R. 423-24 à R. 423-37) », rappelle l’Ordre des Architectes.
Et d’ajouter : « selon l’article R.424-1 du code de l’urbanisme, le silence gardé par l’autorité compétente à l’issue du délai d’instruction vaut autorisation tacite (sauf exceptions prévues aux articles R.424-2 et R. 424-3) ».
Maison bois : pas d’autorisation tacite de l’administration
Toutefois, pendant cette période de confinement, le risque était de voir des délais expirer, sans que les services aient véritablement eu les moyens de faire les vérifications nécessaires.
Dès le 21 mars, dans ses « Recommandations pour assurer la continuité des services publics locaux, dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire », le ministère de la Cohésion des Territoires avertissait : « Les services d’urbanisme pourront voir leur activité réduite dès lors que le projet de loi d’urgence prévoit une suspension du délai légal de traitement des autorisations d’urbanisme. Ainsi, l’inactivité d’un service ne générera pas, au cours de cette période, une décision implicite de la commune ».
L’ordonnance du 25 mars 2020 vient donc mettre au clair ce point : pas d’autorisation tacite durant cette période.
Maison bois : quand est-ce que mon permis de construire sera délivré ?
« L’article 3 de l’ordonnance prévoit que les autorisations, permis et agréments dont le terme vient à échéance entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire (soit le 24 juin) sont prorogées de plein droit jusqu’à l’expiration d’un délai de deux mois suivant la fin de cette période (soit le 24 août 2020) », informe l’Ordre des Architectes.
De même, une demande dont le délai d’instruction expire après le 12 mars 2020 ne peut donner lieu à aucune autorisation tacite : le délai d’instruction de cette demande est suspendu et reprendra son cours un mois après la déclaration de la fin de l’état d’urgence sanitaire.
Cette règle s’applique aussi en cas de dossier incomplet : le délai pour demander des pièces complémentaires (qui est en principe d’un mois à compter de la réception de la demande de permis) est également suspendu à compter du 12 mars 2020.
Dans le cas où la demande est déposée à compter du 12 mars, l’examen des dossiers pourra être reporté puisque le délai d’instruction ne commencera à courir qu’un mois après la déclaration de la fin de l’état d’urgence sanitaire.
Toutefois, il ne faut pas oublier que certains services d’urbanisme poursuivent leurs activités et sont donc en mesure d’instruire normalement les demandes de permis de construire et d’urbanisme en général. Tous les projets ne sont donc pas bloqués.
Sidération et incompréhension des professionnels
La publication de cette ordonnance n’a pas manqué de faire réagir les professionnels de la construction, dans un période où le gouvernement les a sommés de poursuivre leurs activités. « Au moment où l’ensemble des acteurs de la filière de la construction se mobilisent afin de trouver des solutions pour leur permettre de poursuivre ou reprendre leurs activités, tout en respectant les exigences en matière de protection et de sécurité qu’imposent le contexte sanitaire actuel, l’État, sans aucune concertation, vient donc porter un coup fatal à un secteur économique qu’il considère paradoxalement indispensable et stratégique pour limiter les effets économiques de l’épidémie qui frappe le pays ! », expliquent les constructeurs, promoteurs et aménageurs de la Fédération française du Bâtiment (LCA-FFB)
« Concrètement, ces dispositions aboutissent à ce qu’aucun permis de construire ou d’aménager ne soit délivré sur l’ensemble du territoire avant le 25 juin 2020. Les permis délivrés, y compris avant l’état d’urgence, ne seront quant à eux purgés de recours qu’au 25 octobre 2020. Ces mesures auront pour conséquence un coup d’arrêt brutal et inacceptable de la filière bâtiment pour les six prochains mois », prédisent-ils.
Vers une modification de l’ordonnance ?
Pour Grégory Monod, président de LCA-FFB, « ces dispositions sidérantes vont asphyxier encore davantage notre secteur. (…) Toutes nos entreprises aujourd’hui se démènent pour concilier ces impératifs. L’État ne doit pas casser ce mouvement. Cela suppose qu’il revienne de manière urgente sur ces textes, notamment sur la question des recours, et qu’il trouve des solutions en matière d’organisation des services pour permettre la poursuite des instructions des autorisations d’urbanisme.»
Le 30 mars, 9 organisations professionnelles (CINOV, FPI, LCA-FFB, SYNAMOME, UNSFA, UNAM, UNGE, UNTEC, USH) rejoignaient le mouvement et demandaient un travail commun sur le sujet.
Tout n’est donc pas entièrement jouer d’avance mais la patience reste de mise si vous avez un projet de construction de maison bois, pendant cette période de confinement.
Photo de Une : © Alaya Maisons Bois
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