Dans un rapport publié le 25 mai dernier, la Cour des comptes estime qu’il faudrait un nouveau fonds d’aide à la filière forêt-bois afin d’aider au repeuplement forestier, à la structuration de la filière et à la production de matériaux de construction en bois. Explications.
En France, l’activité de la filière forêt-bois représente 60 Md€ et 440 000 emplois. Or, « la filière est, depuis au moins deux décennies, en crise structurelle, entretenue par un sous-investissement chronique et une compétitivité insuffisante. Cette crise révèle un manque d’intégration entre l’amont et l’aval, entre l’offre et la demande de bois », pointe du doigt la Cour des comptes, dans son rapport publié le 25 mai dernier.
Une forêt sous exploitée mais menacée
Selon l’institution, chargée de vérifier l’emploi des fonds publics, la forêt n’est que « partiellement exploitée ». Seule la moitié de son accroissement annuel est récolté, le volume de bois en forêt ayant ainsi augmenté de 45 % en 30 ans.
En cause des difficultés d’accès aux terrains (relief), des métiers de l’exploitation et de la transformation du bois qui manquent d’attractivité, et des engagements de gestion durable appliqués par un tiers seulement de la forêt privée.
« Paradoxalement, une part croissante de l’opinion publique, tout en étant favorable à l’utilisation de bois, accepte de moins en moins les coupes d’arbres, concevant la forêt avant tout comme un lieu de loisirs et un espace menacé à sanctuariser, bien que la déforestation ne touche pas les forêts françaises, qui ont au contraire doublé en deux siècles », souligne le rapport.
Les deux principales menaces qui pèsent sur les forêts ne sont pas liées à l’exploitation humaine. Selon ce rapport, la première implique le grand gibier, qui consomme les plantules et écorcent les arbres. La seconde, le dérèglement climatique, qui augmente le risque de tempêtes, de sécheresses et rend les arbres plus vulnérables aux insectes et aux champignons parasites.
« Même si la forêt est en croissance, elle ne se renouvelle plus assez, que ce soit par régénération naturelle ou par plantation, en net recul depuis vingt ans, d’où des craintes sur la disponibilité en bois d’œuvre à moyen terme », s’inquiète la Cour des comptes.
Construction bois : une aide pour le repeuplement forestier
La stratégie adoptée par la France se fonde sur l’idée que la gestion active de la forêt, par l’amélioration des peuplements et une mobilisation accrue de bois, permet d’augmenter la séquestration de carbone : enjeux climatiques et économiques vont ainsi de pair.
Dans son rapport, l’institution préconise la création d’un fonds d’aide au repeuplement. Ce fond « simple, stable et incitant à la qualité (via la certification des produits, voire à terme des professionnels) », réunirait tous les financements existants, ainsi qu’une fraction du produit des enchères de quotas carbone européens. Il serait géré par un opérateur tel que l’Ademe.
Éviter l’importation de bois en structurant la filière
Autre problématique : la structuration de la filière forêt-bois qui « malgré des efforts » reste insuffisante.
« La spécialisation de la filière n’est pas favorable : elle exporte beaucoup de bois brut et importe de plus en plus de produits transformés. L’industrie de première transformation du bois est insuffisamment adaptée à son marché, ce qui contraint l’industrie de deuxième transformation à importer des sciages et des bois élaborés », indique le rapport.
Afin d’éviter une augmentation des importations, la Cour des comptes préconise de soutenir la production de matériaux de construction bois au moyen d’un troisième fonds bois, à créer auprès de BPI France.
Construction bois : l’échelon régional indispensable
« Cette politique de filière rénovée doit être menée dans un cadre cohérent et au plus près des territoires », assure la Cour des comptes. L’enquête menée sur le terrain fait apparaître « les acteurs régionaux paraissent mieux armés que l’État pour répondre rapidement aux crises localisées, comme le montre celle des scolytes dans le Grand Est, même si le soutien de l’échelon national reste indispensable ».
En aval, la future réglementation environnementale RE 2020, en application de la loi ELAN de 2018, en rendant obligatoire l’affichage du bilan carbone des matériaux de construction, devrait développer l’usage du bois, sous réserve des textes en préparation pour sa mise en œuvre.
« Les démarches de labellisation et de certification des matériaux en bois demeurent insuffisantes et à encourager, tout comme la collecte et l’analyse des données sur la filière forêt-bois, grâce à des outils numériques de télédétection pour mieux connaître l’état réel des forêts », détaille le rapport.
Et de conclure : « l’État doit soutenir les acteurs de la filière dans la communication sur la gestion durable des forêts, qui ne saurait reposer uniquement sur les acteurs privés ».
Texte : C.T – Photo : © Pixabay
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